L'actualité technologico-juridique internationale (3 septembre 2013)
La Nouvelle-Zélande abolit le brevet logiciel (vraiment ?)
Après cinq années de débats, le parlement néo-zélandais a décidé de bannir les logiciels du champ d’application de la loi sur les brevets (Patents Bill). Dans une nouvelle disposition 10A, on trouve ceci :
A computer program is not an invention and not a manner of manufacture […].
Certains voudront crier victoire, pourtant cela signifie seulement qu’un logiciel en tant que tel et pris isolément ne peut pas être breveté. L’invention qui est mise en oeuvre par un logiciel qui fait partie d’un processus et qui contribue à implémenter le processus pourra être brevetée. C’est la solution déjà en vigueur en Europe. Pour plus de détails sur le brevet logiciel, vous pouvez consulter cet article.
Facebook condamné pour violation de la vie privée (encore !)
Dans une class action contre Facebook (Angel Fraley et al. v Facebook Inc.), la Cour de District de la Californie du Nord a validé un arrangement de 20 millions de dollars afin de mettre un terme à un litige où Facebook était accusé d’avoir utilisé les noms et visages d’utilisateurs dans les liens publicitaires sponsorisés sans la permission des utilisateurs concernés, et sans les rémunérer. Plus d’infos sur The IPKat.
Hotfile perd contre la MPAA
L’hébergeur panaméen Hotfile a été condamné la semaine passée pour infractions au droit d’auteur. Le jugement n’a pas encore été rendu public, mais la Motion Picture Association of America (MPAA) s’est félicitée de cette décision. Hotfile, en tant qu’hébergeur, est censé être immunisé contre les actions en justice des ayants droit pour autant qu’il se conforme à quelques obligations. Ici, c’est sa responsabilité secondaire qui a été engagée : elle permet d’imputer à l’hébergeur le comportement de celui qui a directement violé le droit ; on considérera donc l’intermédiaire comme complice de l’infraction. Plus surprenant, il semblerait que le gérant de Hotfile, Anton Titov, ait été reconnu personnellement responsable.
Chris Dodd, CEO de la MPAA, s’est exprimé en ces termes :
We applaud the court for recognizing that Hotfile was not simply a storage locker but an entire business model built on mass distribution of stolen content. Today’s decision is a victory for all of the men and women who work hard to create our favorite movies and TV shows, and it’s a victory for audiences who deserve to feel confident that the content they’re watching online is high-quality, legitimate, and secure.
Je me permets d’ajouter un commentaire personnel. Je trouve dommage que la MPAA se réjouisse de cette décision, et qu’une décision de ce genre ait été rendue. Bien qu’il soit de notoriété publique que Hotfile était utilisé pour s’échanger illégalement des contenus protégés par le droit d’auteur, il faut rappeler que les ayants droit devraient plutôt s’attaquer aux vrais contrefacteurs, pas aux intermédiaires. En effet, un tel jugement peut mettre en danger d’autres hébergeurs comme Google ou Dropbox. La MPAA devrait plutôt utiliser ces services et adopter la même vision que Kevin Spacey :
Le succès du modèle de Netflix, qui a mis en ligne toute la première saison d’un coup, prouve une chose : le public veut avoir le contrôle, il veut la liberté. À travers cette nouvelle forme de distribution, nous avons prouvé que nous avons compris les leçons que l’industrie de la musique n’avait pas comprises : donnons aux gens ce qu’ils veulent, quand ils le veulent, sous la forme qu’ils veulent, à un prix raisonnable. Et alors ils seront prêts à payer pour ces contenus plutôt qu’à les voler. (Source)
Hébergeurs et contenus manifestement illicites
Overblog a été condamné en France pour le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Brest, car la société a refusé de retirer de sa plateforme des déclarations injurieuses et méprisantes à l’encontre d’une personne. Cette dernière avait demandé à Overblog de les retirer, ce qu’Overblog n’a pas fait, préférant que la justice se détermine d’abord sur l’illicéité du contenu avant de procéder à un éventuel retrait. Les juges ont au contraire estimé que la position d’Overblog était “contraire à la [LCEN, ndr] qui impose à l’hébergeur de retirer les informations manifestement illicites dont il a connaissance sans attendre une éventuelle décision judiciaire”.
Attendu qu’en matière de diffamation, la vérité des faits imputés peut en général être rapportée de sorte que l’illicéité du contenu ne peut être certaine avant qu’une décision judiciaire ait été rendue à ce sujet ; que la disposition légale susvisée, telle qu’interprétée par le Conseil constitutionnel, n’exige toutefois pas que le contenu soit certainement illicite, mais seulement qu’il le soit manifestement […] ; […] le cumul et la nature objectivement délirante de ces accusations, dont il est évident qu’elles portent atteinte à l’honneur et à la considération de la personne qu’elles visent, suffisent amplement à considérer qu’elles sont dénuées de tout fondement et, dès lors, manifestement illicites.
Overblog a annoncé avoir fait appel de ce jugement.
Bonus (stupide) : envoyer des messages à une personne en train de conduire
S’il est de notoriété publique que téléphoner au volant (sans kit mains libres) ou écrire un message avec son téléphone portable tout en conduisant est interdit, un tribunal du New Jersey (USA) a franchi un pas supplémentaire. Une personne qui envoie un message à une autre personne en train de conduire peut voir sa responsabilité engagée. C’est le verdict d’un procès en responsabilité intenté par deux personnes contre un conducteur qui consultait ses messages ou en écrivait un, mais aussi contre la personne qui avait écrit au conducteur. Cette personne n’a pas été reconnue responsable, mais si elle avait su que le destinataire de son message était au volant, elle aurait dû s’abstenir de lui écrire.
[…] a person sending text messages has a duty not to text someone who is driving if the texter knows, or has special reason to know, the recipient will view the text while driving.
PS : I am speechless.