Je n'aime pas le spam, sauf quand il vient de Suisse
J’ai une sainte horreur du spam. Vraiment. Tout comme des appels téléphoniques publicitaires ou pour des sondages ou que sais-je encore. Certes, la liberté économique doit être protégée, et l’économie a besoin de la publicité, mais quand celle-ci devient intrusive et dérangeante au point de vous atteindre directement chez vous, ça va trop loin.
La publicité non sollicitée, qu’elle soit sous forme papier, téléphonique ou autre, ça m’agace. Quant au spam, lorsqu’il vient d’une société ou d’une personne suisse, on peut plus facilement agir.
Alan : Denny, you’re an American. What does any true red-white-and-blue American do when he’s been wronged, or even slightly put out, for that matter ?
Denny : We sue.
(Boston Legal, série télévisée américaine, saison 3, épisode 12)
Hier, j’ai reçu cet e-mail.
Cet e-mail publicitaire provient du service SB.ch et promeut un site de vente en ligne. N’ayant jamais entendu parler de ce service et n’ayant donc jamais été en contact (personnel ou commercial) avec eux, on peut donc qualifier ce message comme “non sollicité”.
Note : Comme je n’ai pas envie de leur faire de publicité, je nommerai le service web SB, la société CA et son responsable OL tout au long de cet article. Si vous souhaitez connaitre leurs coordonnées complètes (issues de registres publics), consultez les images et documents de cet article.
Le problème du spam habituel est qu’il provient souvent d’entreprises ou de personnes étrangères qui utilisent des services informatiques mis à disposition par des tiers (comme Gmail, Yahoo, etc.) en général eux aussi à l’étranger ; les personnes, contrairement aux entreprises, sont très souvent non identifiables. Ce qui rend une éventuelle action en justice impossible, très difficile ou demandant d’investir beaucoup de moyens.
Heureusement, ce n’est pas le cas ici. En effet, selon les deux documents ci-dessous, SB.ch est un nom de domaine enregistré en Suisse. Je m’en plaignais récemment, mais cette fois ça m’a rendu service : la base de données whois pour les noms de domaine .ch ne peut pas être caviardée ce qui m’a permis de connaitre le nom du détenteur du nom de domaine.
Une fois le nom du détenteur connu, une recherche de la raison de commerce de la société CA Sàrl dans la base de données nationale Zefix me donne des informations supplémentaires sur l’heureux gagnant.
Ces informations en main, il ne me reste plus qu’à signifier à ces personnes mon profond agacement… et mes menaces de poursuites pénales. En effet, toute personne qui
envoie ou fait envoyer, par voie de télécommunication, de la publicité de masse n’ayant aucun lien direct avec une information demandée et omet de requérir préalablement le consentement des clients, de mentionner correctement l’émetteur ou de les informer de leur droit à s’y opposer gratuitement et facilement ; celui qui a obtenu les coordonnées de ses clients lors de la vente de marchandises, d’oeuvres ou de prestations et leur a indiqué qu’ils pouvaient s’opposer à l’envoi de publicité de masse par voie de télécommunication n’agit pas de façon déloyale s’il leur adresse une telle publicité sans leur consentement, pour autant que cette publicité concerne des marchandises, oeuvres et prestations propres analogues ;
agit de façon déloyale selon l’article 3 alinéa 1 lettre o de la loi fédérale sur la concurrence déloyale (LCD). Selon l’article 23 de cette même loi,
quiconque, intentionnellement, se rend coupable de concurrence déloyale au sens des art. 3, 4, 4a, 5 ou 6 est, sur plainte, puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
Toutefois, tout le monde ne peut pas porter plainte contre ces comportements. En effet, selon ce même article 23,
peut porter plainte celui qui a qualité pour intenter une action civile selon les art. 9 et 10.
Pour avoir la qualité pour agir au civil (art. 9 LCD), il faut subir une atteinte dans sa clientèle, son crédit ou sa réputation professionnelle, ses affaires ou ses intérêts économiques en général ou en être menacé. Cette disposition concerne donc essentiellement les concurrents, voire des tiers.
Toutefois, l’art. 10 LCD prévoit que les clients dont les intérêts économiques sont menacés ou lésés par un acte de concurrence déloyale peuvent aussi agir, tout comme les associations professionnelles ou de consommateurs. (Le terme “clients” englobe celui de “consommateurs” au sens large.) Il est évident que la preuve du dommage sera difficile à apporter pour le client, spécialement dans un cas de publicité déloyale comme celui-ci, mais cela n’empêche pas le dépôt d’une plainte pénale (ou d’une action civile).
Il faut relever encore que des sociétés telles que Ricardo.ch pourraient dénoncer civilement et pénalement cette pratique en invoquant une atteinte ou une menace à leurs intérêts économiques. (D’ailleurs, les sociétés n’ont pas à être en rapport de concurrence.) Par contre, je rappelle que la “class action” n’existe pas en Suisse.
Il est donc temps d’agir… puisque c’est réellement possible.