François Charlet

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Le mandat pour saisir les biens de Kim Dotcom (Megaupload) était bien valide

19/02/2014 3 Min. lecture Droit François Charlet

Ce mercredi, dans une décision de plus de 40 pages, une Cour d’appel néo-zélandaise (Court of Appeal) a renversé le jugement d’une Cour inférieure (High Court) qui avait déclaré, en juillet 2012, que les mandats délivrés à la police pour fouiller la maison de Kim Dotcom, fondateur de Megaupload et de MEGA, étaient invalides, rendant ainsi la perquisition illégale.

La High Court avait estimé que les mandats étaient trop imprécis et qu’ils ne permettaient pas de circonscrire les différents paramètres de la fouille et des saisies. En particulier, les infractions reprochées à Kim Dotcom n’étaient pas précisément décrites. Le NZBORA (New Zealand Bill of Rights Act) protège en effet toute personne contre les fouilles, perquisitions et saisies. Ce raisonnement n’est pas celui de la Cour d’appel.

Kit Dotcom avait contesté ces mandats en particulier dans le but d’éviter une extradition aux États-Unis où il aurait été jugé notamment pour violation des droits d’auteur ainsi que pour blanchiment d’argent.

La Cour d’appel a donc jugé que, sur la base du MACMA (Mutual Assistance in Criminal Matters Act), les mandats étaient valides, bien que perfectibles.

Selon nous, tout lecteur raisonnable destinataire de ces mandats de perquisition peut comprendre à quoi ils se rapportent. Cet avis est renforcé par le fait que Kim Dotcom est un expert en informatique qui a pu identifier sans difficulté les diverses références faites dans le mandat de perquisition visant ses sociétés (Megaupload, Megavideo et Megastuff Ltd) ainsi que la description des différentes catégories des produits électroniques visés en annexe.

Les imprécisions ne sont donc pas radicales au point qu’elles nous obligeraient à les déclarer comme nulles. […] En d’autres termes, il s’agissait seulement d’une erreur dans la forme non dans le fond.

Cette défaite peut paraitre douloureuse, mais il convient de la relativiser. En effet, la Cour d’appel a quand même rejoint la High Court sur un point : les copies de certaines pièces à conviction n’auraient jamais dû être transmises au FBI, mais auraient dû rester sous scellés, au commissariat.

La section 49 du MACMA dispose que les biens saisis doivent être gardés et doivent rester sous le contrôle du commissariat, ce dernier devant attendre les instructions des autorités judiciaires. Le commissariat ne doit rien faire dans l’intervalle. Contrairement aux dispositions légales et aux instructions du procureur de la Couronne qui avait exigé que ces éléments restent sous le contrôle du commissariat, la police avait permis au FBI d’accéder à ces éléments, et d’en faire des copies pour les emmener aux États-Unis.

Comme l’a justement rappelé la Cour d’appel, une fois que les copies des données sont sorties de la juridiction néo-zélandaise, celle-ci perd tout contrôle sur ces données. D’un point de vue constitutionnel, cela met en péril le droit de Kim Dotcom à pouvoir bénéficier d’un procès équitable, car il ne peut avoir accès aux données l’incriminant.

Selon les avocats de Kim Dotcom, un recours à la Cour Suprême néo-zélandaise n’est pas exclu. Ce qui est certain, c’est que le FBI va conserver les données obtenues (illégalement) et va continuer à chercher un moyen d’extrader Kim Dotcom.